À chaque fois que les néolibéraux soumettent un projet devant les Français, celui-ci est présenté comme la seule option sans aucune alternative possible. Pour sa réforme des retraites, le gouvernement a décidé de nous rejouer cette ritournelle, et peu importe s’il existe en réalité différentes éventualités.
Il faut « sauver notre système » nous répètent à tout bout de champ le gouvernement. Et pour y arriver, un report de l’âge légal de départ à 64 ans serait l’unique moyen. Toute idée contraire relèverait, sur les bases de leur unique constat et idée du monde, de l’hérésie pure et simple ou du populisme. Et pourtant, certains acteurs politiques proposent bien d’autres pistes.
Ne rien faire
Mais avant d’aborder ces suggestions, il convient d’abord de redire, comme nous l’avions fait dans notre précédent article consacré aux 5 mensonges de la Macronie sur ce sujet, qu’en l’état, cette réforme n’a pas lieu d’être. En effet, notre fonctionnement actuel est parfaitement soutenable sur le long terme tant le déficit à venir est gérable.
Rappelons d’ailleurs que le terrible excès de dépenses censé anéantir notre système qu’évoque le gouvernement ne représenterait en réalité qu’entre -0,5 et -0,8 % point de PIB. Il ne s’agirait donc pas d’un véritable problème pour l’État, qui pourrait facilement combler ce manque.
Taxer les riches
Il dispose pour cela de plusieurs solutions. La première consiste bien évidemment à compenser ces pertes par une plus forte imposition sur les plus aisés d’entre nous. Dans son dernier rapport sur les inégalités mondiales, Oxfam soulignait ainsi que taxer 2 % de la fortune des 42 milliardaires français suffirait à résorber ce déficit.
On a calculé : taxer la fortune des milliardaires à hauteur d’à peine 2% permettrait de financer le déficit prétendument hors de contrôle des #retraites.
Du coup, plutôt que de faire porter le poids de la réforme aux plus précaires, nous avons une idée @EmmanuelMacron… pic.twitter.com/Oy39ihsZd3
— Oxfam France (@oxfamfrance) January 16, 2023
Mais visiblement, le gouvernement préfère faire travailler des millions de personnes deux années de plus que de toucher à 2% du magot de seulement 42 privilégiés.
C’est une logique d’autant plus incompréhensible qu’on apprend dans ce même rapport que les 1 % les plus fortunés du monde ont mis la main sur 63 % des richesses produites sur terre l’an passé.
En réalité, combler un déficit de 10 à 12 milliards par an n’a rien de très compliqué pour l’État s’il daignait s’attaquer aux grands monopoles. Sur son dernier quinquennat, Emmanuel Macron a d’ailleurs fait sauter pas moins de 60 milliards d’impôts dans le pays.
Macron a fait des dizaines de milliards de cadeaux aux riches et il a choisi de tuer les pauvres à la tâche pour compenser, mais il se permet de parler de justice
L’arrêter, c’est une question de survie#ReformesDesRetraites #GreveGenerale #greve19janvier pic.twitter.com/mcDuzfyaaz
— Marcel (@realmarcel1) January 13, 2023
Évidemment, ce ne sont pas les classes populaires qui en ont le plus tiré parti (d’autant qu’elles sont touchées de plein fouet par la dégradation des services publics qui en découlent), mais bien les plus riches. Depuis l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron, les 500 familles les plus aisées sont ainsi passées de 454 milliards à 952 milliards d’euros de patrimoine… Les écarts continuent de se creuser à un paroxysme difficilement justifiable.
Rétablir un impôt sur la fortune (en le renforçant), taxer les dividendes (encore 80 milliards pour le CAC40 l’an dernier) et les super profits pourrait donc offrir largement de quoi financer ce manque. Et ne parlons pas des 100 milliards de fraude fiscale perdus chaque année et que l’État n’essaie même pas de récupérer.
Quand on observe ces chiffres, on comprend aisément que le déficit prévu pour les retraites est infime et n’est qu’un prétexte du gouvernement pour dégrader notre service public et favoriser l’avènement de fonds de pension privés.
Réallouer des fonds
Le pire est que même sans taxer le moindre centime supplémentaire, la France pourrait facilement compenser ces pertes par divers moyens. L’État dépense ainsi pas moins de 157 milliards en subventions, crédit d’impôt ou exonération aux entreprises.
Un rapport de la CGT explique pourtant que ces décisions n’ont aucune espèce d’utilité que ce soit sur l’emploi ou la relocalisation de notre industrie. Comme nous l’avons vu précédemment, cet argent va surtout servir à enrichir les plus aisés et les actionnaires. Dans ces conditions, il serait peut-être plus judicieux de faire usage de ces deniers publics en faveur des citoyens et citoyennes qui constituent le pays, par exemple pour financer nos retraites.
Augmenter les cotisations
On peut aussi imaginer tout simplement faire disparaître le déficit au sein même du système de retraite. Pour cela, il existe trois solutions sérieusement étudiées par des économistes. Celle choisie par le gouvernement consiste à nous obliger à travailler plus longtemps, parfois jusqu’à la mort. On pourrait également baisser les pensions des retraités (ce qui pourrait se défendre pour les très hautes pensions). Enfin, l’option la plus avantageuse pour tous serait d’accroître le montant des cotisations.
Avec la dégradation permanente du pouvoir de vivre, on pourrait penser les Français assez réticents à cette résolution. La Macronie n’hésite d’ailleurs pas à continuellement se cacher derrière cet argument, comme elle le fait aussi pour « l’augmentation des impôts ».
Pour autant, comme pour les taxes, rien n’oblige d’étendre les cotisations soit pour tout le monde soit pour personne. Et, ce, même si un sondage a révélé que 59 % des interrogés seraient prêts à cotiser plus pour ne pas avoir à partir deux ans plus tard. Si l’on suivait cette voie, sans rien changer, cela coûterait environ 14 euros par mois supplémentaires d’ici 2027 à un Français au SMIC, selon les estimations de l’économiste Michael Zemmour.
Il serait cependant inutile d’en arriver là : il est, au contraire, possible de cibler cette augmentation sur les plus riches par un principe fondamental de proportionnalité et de justice sociale. On pourrait également réajuster les cotisations patronales afin de recouvrer très rapidement à l’équilibre. Globalement, mettre plus à contribution les entreprises, en particulier les plus grosses et en épargnant les PME, pourrait être une solution plus qu’intéressante. A ce propos, il n’est d’ailleurs pas inutile de noter que les classes bourgeoises ont toujours su semer la confusion en se cachant derrière des “petits” patrons et des aperceptions d’échelles pour justifier leurs incomparables privilèges.
Président de la République#EmmanuelMacron pic.twitter.com/RNLQKAaG6P
— Dr. Un Seigneur • 开玩笑 (@USeigneur) February 11, 2020
Et si on revenait à la retraite à 60 ans ?
À la lumière de toutes ces données, on constate aisément que le catastrophisme du gouvernement actuel est bien destiné à faire peur, notamment aux seniors qui pourraient craindre de perdre leurs pensions si le système venait à s’effondrer.
Dans la réalité, le déficit à venir est plus que gérable. Les sources de revenus potentielles sont telles que l’on peut même songer à aller plus loin. S’il est parfaitement possible de payer la retraite à 62 ans, il serait en réalité tout à fait envisageable de renouer avec ce que nous avons connu pendant presque trois décennies : le départ à 60 ans.
Réclamée et proposée par bon nombre d’organisations syndicales, elle est aussi défendue par plusieurs élus politiques, notamment de la NUPES. La France Insoumise, qui en a fait un cheval de bataille, a d’ailleurs présenté plusieurs sources de financement supplémentaires pour cette réforme. Elle suggère ainsi d’augmenter de deux points la cotisation déplafonnée (salaire supérieur à 3400 €), de supprimer les baisses de cotisations vieillesses, et d’établir l’égalité salariale entre les femmes et les hommes.
Un dernier levier pourrait bien sûr être celui de la création d’emplois. Plus il y aura de personnes au travail, plus les caisses de cotisations se rempliront. Quand on sait le chantier colossal que représente la bifurcation écologique, on peut songer qu’il existe quelques pistes de postes à mettre en place…
– Simon Verdière
Couverture Montage @MrMondialisation
The post Retraites : il existe des alternatives au projet Macron first appeared on Mr Mondialisation.